Le texte de cadrage du colloqueÉtudier le cas du Parti conservateur britannique à la suite de sa défaite à l’élection législative du 4 juillet 2024 revêt un intérêt scientifique majeur à l’heure de la montée du populisme en Europe. À contre-courant de l’élection de Giorgia Meloni à la tête du gouvernement italien, des coalitions entre modérés et démocrates nationalistes en Suède et en Finlande, de la percée du parti Vox en Espagne, et du choix grandissant du Rassemblement National par les électeurs français aux élections européennes et aux législatives, le Parti conservateur britannique a subi une défaite historique face au Parti travailliste après 14 années au pouvoir. Il n’a obtenu que 121 sièges à la Chambre des communes - un résultat sans précédent dans l’histoire du parti qui, en perdant 244 sièges, a laissé à son principal rival une majorité de près de 170 sièges, la plus large remportée depuis 25 ans. Lors de la campagne, 75 députés conservateurs, tels Theresa May et Michael Gove, avaient déjà décidé de ne pas se représenter. À l’issue du scrutin, des personnalités de premier plan, dont l’ancienne Première Ministre Liz Truss, mais aussi Grant Shapps ou Jacob Rees-Mogg, ont perdu leurs sièges.
Précédemment, le Parti conservateur britannique s’était longtemps présenté comme le « parti naturel de gouvernement », celui des figures historiques comme Benjamin Disraeli, Winston Churchill ou Margaret Thatcher, le parti de la compétence économique, celui qui avait su occuper le pouvoir au Royaume-Uni (RU) pendant les deux tiers du XXème siècle décrit comme « le siècle conservateur ». Certes, le RU et ses gouvernants conservateurs ont eu à gérer une série de crises depuis 2010 : une première période d’austérité jusqu’en 2016, la saga autour du Brexit, la récession économique de 2023, en passant par la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine débutée en février 2022. Avec ou sans corrélation, les remous politiques se sont multipliés au sein du Parti conservateur sur fond renouvelé de scandales divers. Les signes les plus visibles de ces remous ont été les démissions forcées, à l’automne de 2022, de Boris Johnson, puis de Liz Truss après 49 jours à son poste. L’été 2024 présentant une accalmie économique, Rishi Sunak en a profité pour avancer les élections de cinq mois : un pari risqué, et finalement perdu.
Fort de ce constat, ce colloque a pour ambition de mettre en lumière les bouleversements qui ont marqué le Parti conservateur britannique au cours de ses années au pouvoir, au prisme des crises internes au parti, et leurs répercussions à l’échelle nationale, dans un contexte international instable. Le colloque s’interrogera également sur les perspectives de recomposition, organisationnelle et idéologique, que laisse présager la période d’opposition dans laquelle le parti est entré. L’adaptabilité du Parti conservateur britannique lui permettra-t-elle de se réformer, voire de se réinventer, et dans quelle direction ? Un Parti conservateur réinventé fera-t-il bientôt concurrence au “changed Labour Party” de Keir Starmer et au Reform UK de Nigel Farage ? |